Le tissu choisi... Le costume est l'ultime rideau d'un théâtre, et c'est le seul à ne pas s'ouvrir...

Uniquement ce que l'oeil du spectateur écarte - à force d'attention, de pensées, d'émotion - lui permet d'aller au coeur du comédien "défendant" son rôle... Oui, tout cela est un peu lyrique - mais pourquoi pas le lyrisme ? -

Un plateau nu, sans rideaux ni pompiers peut-être fascinant aussi... avec ce côté dépouillement du second tour, quand tout semble joué, mais possible aussi (l'homme est un éternel naïf) !...

Le fil blanc, toutes les coutures du théâtre... Chercher dans le faux, retourner l'étoffe, chercher dans l'ourlet.

Costumière: elle fait des points et des points et ces points deviennent sa phrase, son oeuvre, alors qu'un auteur, parfois, il ne met aucun point - pas de coq sur son clocher ! - Et parfois aussi son texte est un pull d'été sans manches; j'en ai eu un jaune clair et un bleu clair, vers douze ans. En Bretagne l'air y passait entre les mailles... Finalement le souvenir d'un comédien sur scène, c'est sa voix ou sa gestuelle ? Son costume ou son rôle ? Une réplique, un regard ou un déplacement inattendu, une lumière, une ombre sur lui ? L'ensemble forme dans la mémoire un point lumineux, un phare qui se remet à briller pour peu qu'on prenne le temps de l'attendre dans l'esprit d'un rendez-vous sans heure.

Dans "Incroyable !", il fallait pour Hilflos un costume qui : 1/ Ne fasse pas pauvre 2/ Puisse faire penser qu'il soit sorti impeccable du costumier du théâtre 3/ Qu'il ne montre pas des formes de costume de clown 4/ Qu'il n'aille pas trop non plus vers l'habit de Maître de cérémonie ni de groom... Et bien sûr qu'il soit pratique à porter. Un costume à inventer, donc. D'ailleurs vous pouvez vous essayer à quelques croquis d'après ces données; nous serions curieux d'autres propositions... Et puis: comment va s'inscrire le costume dans les lumières, à côté de cette vieille frise de l'ancien Théâtre de Laval et qui constitue, par ses lignes choisies, l'essentiel de la scénographie

Quand je pense à "costumes", parmi tous les souvenirs là-dessus, revient toujours à un moment l'immense Père Ubu que Claudine (alias Jacqueline Jacques) avait réalisé lors du feu Festival lavallois des Uburlesques. Des mètres de coutures et des milliers de billes de polystyrène; tout cela devait se mettre en forme dans un espace de dix mètres sur dix. Et puis il y a eu l'installation sous la Porte Beucheresse, lieu de naisance du Douanier Rousseau et voisine du logement de Charlotte, soeur de Jarry... qui hébergea longtemps son frère à la fin de sa fin.

Le Père Ubu de Claudine bouchait totalement cette porte: d'un seul coup il était ce pantin magnifique, ce costume immense accroché au clou de l'Histoire locale. C'était très impressionnnant et par la démesure, la tête à elle seule était un costume, tout comme chaque bras, le ventre, les jambes...La ville avait son costume (Nous en ferons un jour - à partir de la photo - une carte postale).

Jacqueline Jacques confectionnant le Père UBU et pensant déjà à Incroyable !

En coudre et en découdre

Partager cet article