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Incroyable !
18 décembre 2014

Les saisons du texte font éclore d'autres saisons, inédites

     L'auteur ne sait pas bien définir l'évolution de son texte. Il croit pouvoir calculer en jours, sa "finitude" après quoi il se réjouira de l'envoi si simple et si rapide du curseur dans le néant... L'auteur souhaite assez rapidement l'arrêt du cache-cache auquel les mots, les séquences, la dramaturgie l'obligent; il voudrait décider tout seul ! L'auteur est pressé même en prenant son temps ! Il voudrait croire que sa page est à remplir, tout simplement, au lieu de la considérer comme la toile d'un peintre qui demande tant de préparation, qui reçoit la peinture un coup en haut, un coup en bas, puis un coup en haut, un coup au centre...

     La page est solidaire de la toile. Il n'a pas le choix, l'auteur: ce n'est pas lui qui mène la partie, et s'il se persuade d'avoir pensé à tout, s'il a cru pouvoir définir ce "tout" il est tout de même rappelé par le texte où se sont nichés tant d'étrangers, où sont passés dans l'ombre nombre d'idées et de soi-disant trouvailles. Parfois un son revenu du texte pour cogner dans la tête de l'auteur suffit à le remettre au travail s'il veut bien écouter !... Quelques petites rectifications ici ou là et l'ensemble est correct ?... Mais non, c'est autrement plus résistant un texte, et qui plus est un texte qui s'écrit pour se retrouver sur scène dans la bouche de son auteur. C'est plus rapide d'écrire pour d'autres, assurément.

     Je ne m'étais jamais attelé à ce genre de travail d'écriture, et je ne suis pas du genre à avoir le sens inné de la formulation avec toute la force et la tension nécessaire, si particulière, pour "passer sur scène". On ne s'improvise pas auteur de théâtre et les étapes sont nombreuses pour arriver à se dire: Oui, je peux écrire des pièces, je peux dérouler des histoires, mettre ça en répliques, mais je ne suis pas un auteur de théâtre... J'ai fait pas mal d'adaptation d'oeuvres pour le théâtre - plongées passionnantes - et adapter est tout de même un travail d'auteur... moins l'invention. Je ne suis donc pas un auteur de théâtre tel que j'en ai l'idée (ou alors par atypisme !). Il faut y consacrer sa vie, travailler dans les théâtres avec des équipes artistiques et avoir la chance d'être mis en scène par des metteurs en scène différents pour faire évoluer son oeuvre... Au fait: combien d'auteurs associés à des théâtres en France ?... Est-ce qu'on compte sur eux pour nous raconter le monde ?

     Petit flash-back: Quelle émotion de voir sur des photos en noir et blanc, Samuel Beckett, aux répétitions de "En attendant Godot"  et Albert Camus mettant en scène "Les Justes" !

      Pour revenir à l'écriture de "Incroyable !"... C'est très bête parfois, le chemin des mots ! Et j'ai par exemple mal supporté dans mon équipe de répliques, la toute première ! Je n'aimais pas ce leader qui disait un truc juste, oui, mais dont je préssentais qu'il devait être remplacé... sans trouver pendant longtemps son remplaçant ! Je faisais dire au personnage qui rentre dans le noir: "Coucou le noir !": Il s'agissait de montrer sa jubilation, sa familiarité avec ce noir propice à ses expériences... Mais "Coucou le noir !", c'est aussi et surtout un peu cucul... Finalement il y a quelques jours j'ai remplacé cette première réplique par cette autre: "Somptueux !" Et c'est fou comme ça déplace la tonalité du spectacle, comme ça apporte du jeu, du théâtre !

     Il y aurait bien d'autres exemples; entre ma première version "définitive" du texte et celle qui sera jouée: une bonne vingtaine: mes camarades se sont moqués ! 

     Je suis intervenu aujourd'hui dans un lycée professionnel - oui on s'occupe un peu entre les répétitions - (des serveurs et des cuisiniers en formation) Il s'agissait de commencer à travailler avec une quinzaine de jeunes un texte écrit (4 pages pour l'instant) sur mesure pour eux... Texte aéré laissant beaucoup de place au jeu. L'un d'eux me dit d'emblée: "Mais, on n'peut pas changer un peu ?", "Pourquoi ?", "Ben, les mots sont un peu vieillots !" Et là, paf, je me prends vingt ans et dans le même temps je suis sûr qu'il a raison.!.. Mais au fait, raison comment ? A la réflexion il aimerait bien, sans doute, qu'on joue tel qu'on parle aujourd'hui quand on est jeune (des codes sont en vigueur). Je lui ai demandé à deux reprises de repérer ces endroits "vieillots", mais il ne m'a rien dit. Accepter de jouer un langage qui n'est pas le sien est-il négociable chez les jeunes?

     Affaire à suivre... Peut-être penser à les mettre à l'écriture ?... En avant pour les saisons inédites !  Ecrire, vous dis-je !

 

 

a table jm c h et tête de fb sur table

 

                                                                  Mise en place par mes camarades de la dégustation de l'auteur !

 

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  • Suivez l'aventure d'une création théâtrale atypique à J - 79 ! Il s'agit de "Incroyable ! - Un homme qui parle - " de François Béchu qui sera créé au Théâtre de Mayenne le 20 janvier 2015 et le 23 à Changé. Une production du Théâtre de L'Echappée (Laval)
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